Qu'est ce que la pair aidance ?


Un.e pair-aidant.e, ou pair expert.e, est une personne qui a vécu un parcours de rétablissement de son/ses trouble.s et qui choisit de partager son expérience avec les personnes en voie de rétablissement.

Le rétablissement, qu’est-ce que c’est ?

Un petit point sur l’histoire du rétablissement

Toute personne concernée par un trouble a une expertise de sa propre expérience ! Aussi bien de son trouble que de son rétablissement. Et pour que cette idée soit prise en compte, elle a fait l’objet d’un long combat de reconnaissance. Un peu d’histoire (bien que récente) pour en connaitre les prémisses :
Aux Etats-Unis, entre les années 1980 et 1990, la militante Judi Chamberlin et Patricia Deegan (docteur en psychologie), toutes deux anciennes usagères de la psychiatrie donnent l’impulsion à un mouvement appelé « les survivants de la psychiatrie ». Ce mouvement vise à dénoncer le système de soin psychiatrique de l’époque et redonner le pouvoir aux usagers dans leur prise en charge. Il marque le début du courant Recovery and empowerment (rétablissement et ré-appropriation du pouvoir). Il participe également aux débuts de la lutte contre la psychophobie, de la déstigmatisation des troubles psychiques et de l’entraide entre pairs.

Pour comprendre la notion de pair-aidance, il parait donc nécessaire d’évoquer celle de rétablissement. Le rétablissement peut être compris selon deux perspectives qui se complètent :

La perspective objective ou médicale selon laquelle « être rétabli » s’apparente à une diminution de la répercussion des symptômes sur la vie quotidienne, dont l’évolution peut se mesurer concrètement et quantitativement. Il est entendu par là une meilleure qualité de vie et un mieux-être.

– La perspective subjective ou expérientielle. En 1993, William A. Anthony, psychologue américain et fondateur du Centre de Réhabilitation Psychiatrique de l’Université de Boston la définit comme « un processus profondément personnel et singulier de transformation de ses attitudes, de ses valeurs, de ses sentiments, de ses buts, de ses compétences et de ses rôles. C’est une façon de vivre une vie satisfaisante, prometteuse et utile, en dépit des limites causées par la maladie ». Pour lui il s’agit de construire un nouveau sens et un nouveau but à sa vie en même temps que d’apprendre à gérer la souffrance liée au trouble.

Se rétablir n’implique pas de « guérir » mais de se reconstruire et de faire progressivement « face à ».

 

Le rétablissement n’implique donc pas une absence de symptômes ou un retour à ce que la personne était avant. Il se caractérise plutôt par une meilleure qualité de vie et par une plus grande autonomie. Il laisse la place à la démarche et à la posture personnelle et singulière de la personne dans différentes dimensions :

L’espoir en l’avenir : souffrir d’un trouble remet plein de choses de la vie en question. Dans le processus de rétablissement, la personne conçoit à nouveau des projets et son pouvoir de faire des choix. L’une des stigmatisations qui existe sur les troubles psychiques est l’impossibilité de construire des projets professionnels, personnels ou familiaux. Ce n’est pas la réalité : au cours de leur parcours, les personnes peuvent apprendre à gérer leurs difficultés et à développer leurs ressources pour mener la vie qu’elles souhaitent vivre.

La redéfinition identitaire : il s’agit de se reconstruire en tant que personne qui n’est pas entièrement définie par son trouble et son diagnostic. Le trouble est une dimension de la personne parmi une multitude d’autres dimensions. Vous n’êtes pas votre trouble,
c’est une partie de vous. Le rétablissement est un processus de re-construction de son mode de vie et aussi de son rapport à soi et au trouble.

L’acceptation du trouble et de ses vulnérabilités : processus de prise de conscience de sa souffrance, s’accompagner dans ses stratégies de gestion des symptômes avec empathie pour soi. Il s’agit aussi de prendre conscience de la stigmatisation et, si
possible, de s’en départir.

 « La personne souffrant d’un trouble mental doit aussi se remettre de la stigmatisation dont elle a si souvent été victime et qu’elle        aura si souvent internalisée au plus profond de son être. Elle doit se remettre des effets iatrogènes des traitements, du manque         d’opportunités récentes pour gérer sa propre vie, des effets secondaires négatifs du chômage et des rêves brisés » (Deegan, 1993)

L’empowerment ou auto-détermination : reprendre le pouvoir sur sa prise en charge, sur son parcours, sur ses choix, sur son environnement, sur ses projets. C’est aussi valoriser ses ressources. Les professionnels et l’entourage peuvent encourager et
favoriser le développement de cette dimension.

La gestion des symptômes : à travers les outils que la personne s’approprie au cours de ses différentes prises en charge.

L’engagement dans des activités signifiantes pour soi : par exemple en s’engageant dans des projets, des associations, en participant à des activités de loisir nourrissantes ou collectives. Ou toute autre idée qui seront les vôtres !

Le soutien par autrui : le développement de ces différentes dimensions peut être largement favorisé si elle est partagée par les professionnels ou l’entourage de la personne.

 

La pair-aidance

Son intervention a pour buts :

– Le partage de son expérience, de sa compréhension et de ses connaissances
avec les personnes qui connaissent des difficultés similaires à ce qu’elle a vécu.
– Le partage de son expérience concernant sa prise en charge et sa propre
recherche de solutions et de stratégies de gestion des difficultés.
– De favoriser la notion d’espoir.
– De favoriser le pouvoir d’agir.
– De soutenir et d’informer.
– De favoriser la destigmatisation.
– De favoriser le sentiment d’identification dans le cadre du processus de
rétablissement.
– De proposer une intervention complémentaire aux prises en charge médicales et
psychologiques soignantes.
– D’adopter une posture collaborative entre l’expertise théorique et l’expertise
expérientielle. Il peut à la fois participer et enrichir les pratiques thérapeutiques et à la
fois sensibiliser au vécu des personnes en souffrance.
Son intervention n’est pas :
– Une substitution aux services de santé mentale existants.
– Une proposition d’entraide mutuelle.

 

Etre pair-aidant.e

Dans le cas où la personne pair-aidante bénéficierait d’un contrat de travail dédié à cette mission, elle peut aussi être appelée travailleur/travailleuse-pair, travailleur/travailleuse social.e ou médiateur/médiatrice de santé-pair.

Statut :
La personne pair-aidante peut intervenir en tant que bénévole ou que salariée, en insertion ou même sous contrat de travail. Elle peut intervenir en institution ou en libéral/ indépendant.

La formation :
Une personne pair-aidante peut compléter son statut de pair-aidant par une formation. Pour bénéficier d’un contrat de travail, elle est nécessaire.

Les licences :
Université Sorbonne Paris Nord : Licence Sciences Sanitaires et Sociales (SSS) parcours Médiateurs de Santé-Pairs

Les diplômes universitaires:
Université Claude Bernard Lyon 1, DU pair-aidance en santé mentale

Université Grenoble Alpes : DU pair-aidance professionnelle en psychiatrie et santé mentale

Université de Tours : DU pair-aidance croisée : théories et pratiques situées 

Les formations : 
C2A Dordogne : Pair ressource en santé mentale – 11 jours

ARIFTS – Angers : Intervenant pair

Sources : 
Articles : 
ANTHONY, W. A., (1993), Recovery from mental illness : the guiding vision of the mental heatlth service system in the 1990’s, Innovations and Research, 2, 3, 17-25
Accessible ici via Google Scholar 

Le Cardinal, P., Roelandt, J., Rafael, F., Vasseur-Bacle, S., François, G. & Marsili, M. (2013). Pratiques orientées vers le rétablissement et pair-aidance : historique, études et perspectives. L’information psychiatrique, 89, 365-370.
Accessible ici

Les sites internet : 
Site du gouvernement, rubrique Pair-aidance
Site du Centre de Réhabilitation Psychosociale

Sensibiliser et Accompagner les personnes avec un trouble de la personnalité Borderline